« Il y a un réel danger pour que nous laissions aux générations futures seulement des décombres, des déserts et des déchets » s’alarmait le pape François, le 6 juillet dernier, à l’occasion de la Conférence internationale convoquée pour le troisième anniversaire de la publication de la Lettre encyclique Laudato si’ sur la sauvegarde de la maison commune. Mgr Peter Loy Chong, 57 ans, archevêque de Suva, capitale des îles Fidji, archipel menacé par l’élévation du niveau des eaux du Pacifique, a pris part à cette rencontre ; il a accepté de répondre aux questions de l’AED.

Monseigneur, pourquoi avez-vous été invité à participer à cette conférence internationale « Sauver notre maison commune et l’avenir de la vie sur Terre » ?

Le niveau des océans augmente chaque année et les îles Fidji disparaissent. Il s’agit de nos maisons ; dans cinquante ans, beaucoup d’entre elles seront submergées. Ce n’est pas juste une question de statistiques : nous pouvons le constater de nos propres yeux.

Avant, sur notre île, tout le monde essayait de construire sa maison près de l’eau : l’air y est bon et il était plus facile d’y pêcher. Vivre près de la mer était considéré comme un signe de réussite. Mais maintenant, de nombreuses maisons doivent être reconstruites dans les hauteurs, plus près des collines, car la mer approche dangereusement.

Dans les années à venir, les habitants de 34 localités côtières des Fidji seront confrontés à des bouleversements qui les contraindront à déplacer leurs habitations, en raison de l’élévation du niveau des eaux du Pacifique.

Le gouvernement des Fidji a identifié ces localités qui, dans les cinq à dix prochaines années, sont menacées. Un village de la province de Bua a déjà été déplacé à Yadua, et il est prévu de déplacer bientôt le village de Tavea.

Les habitants des îles du Pacifique souffrent des effets du changement climatique. La lutte contre le changement climatique constitue une question de survie.

Certaines personnes ont du mal à comprendre le rôle de l’Église dans ce domaine. N’est-ce pas plutôt un problème économique ou politique ?

J’estime qu’il y a deux domaines dans lesquels l’Église joue un rôle important. Premièrement, ce problème affecte le cœur même de notre vie et de notre foi : la création est un cadeau et une responsabilité que Dieu nous a confiée. Et nous devons nous demander si notre manière d’assumer cette responsabilité est la bonne ou non.

Deuxièmement, en tant que pasteur, comment puis-je consoler, accompagner la souffrance que je perçois dans mon peuple ? Leurs cris, leur douleur me font penser aux psaumes de l’Ancien Testament et à la façon dont ils invoquent Dieu à entendre le cri de Son peuple. Par exemple, dans le psaume 12 (13), où nous prions « Jusqu’à quand, Seigneur, m’oublieras-tu sans cesse ? Jusqu’à quand me cacheras-tu ta face? ». Notre foi nous enseigne à transformer nos souffrances et nos angoisses en prières, pour que Dieu entende le cri de mon peuple.

Il ne s’agit pas simplement d’une question extérieure, économique ou politique. C’est une question de respect pour Dieu et pour Sa création et pour soulager la douleur de ceux qui souffrent.

Comment vivre la « conversion écologique » dont parle le pape François ?

Le Saint-Père parle de conversion et je crois que cela nous concerne tous, tant au niveau international que national.

Nos îles sont dévastées, nos rivières polluées, nos arbres abattus. Le résultat est que les poissons disparaissent de nos côtes, ils se déplacent de plusieurs kilomètres et cela se répercute sur le mode de vie des gens ordinaires, car il leur faut à présent des bateaux pour sortir en mer et pêcher, ce qui coûte de l’argent. En d’autres termes, la conversion dont nous parlons doit avoir lieu à l’échelon local.

Mais en plus, une conversion des cœurs s’impose. La conversion écologique ne se déroule pas de manière isolée, la conversion doit aussi être quelque chose d’intérieur, qui survient au cœur de chaque individu. Il doit y avoir un rapprochement avec Dieu, le respect de Sa création, un esprit de solidarité et de générosité envers tous ceux, même s’ils sont géographiquement éloignés, qui restent nos frères en Dieu et souffrent terriblement. Mon peuple pleure ; qui va sécher ses larmes ?

 

 

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