Cet été, l’AED vous propose de découvrir les vies héroïques de témoins de l’Espérance, que ce soit en Algérie, en Roumanie, ou ailleurs, à travers une série de portraits. Aujourd’hui, voici celui de Ghassibé Kayrouz, apôtre du pardon.

Ghassibé Kayrouz naît au début des années 50 dans une famille pauvre mais fervente d’un village de la montagne libanaise : « Enfant, mes parents m’ont parlé de toi et de ton amour pour moi. Ma mère m’a appris à prier : ‘Ma journée est à toi, Ô Seigneur, qui procures à chacun de nous ce dont il a besoin’. Chaque matin, je récitais cette prière et le soir celle-ci : ‘Seigneur, je remets mon esprit entre tes mains’, avec la simplicité d’un enfant…  J’entendais et je voyais tout ceci dans notre foyer, qui était si pauvre que je ne pouvais être envié de personne. En effet, il aurait réellement été impossible de trouver une maison plus pauvre que la nôtre, peut-être à l’exception de l’étable dans laquelle tu es né. Et c’est à cette époque que j’ai compris combien le foyer d’un pauvre pouvait être riche en toi et avec toi, Ô Seigneur. »

A onze ans, il doit quitter les siens pour travailler comme apprenti-menuisier à Beyrouth. Alors qu’il vient d’avoir 17 ans, son père meurt ; il rentre à Nabha pour s’occuper des siens et devient catéchiste. Le prêtre qui l’accompagne apprécie ce garçon calme, pieux et non sans humour et discerne assez rapidement chez lui une vocation sacerdotale. Ghassibé entre au Foyer des Pères jésuites.

La guerre civile commence et fait vite rage alors que Ghassibé se prépare à devenir prêtre. Il reçoit des menaces mais persévère dans sa vocation. En 1975, lorsqu’il rentre à Nabha pour Noël, il est assassiné par des miliciens islamistes, le jour de la Nativité. Dans un tiroir de sa chambre, ses parents retrouveront un texte prémonitoire qu’il a écrit la veille de sa mort et qui est lu lors de son enterrement : « Lorsque j’ai commencé à écrire ce testament, c’était comme si une autre personne parlait pour moi… Tout le monde, ces temps-ci, est en danger, Libanais ou résidents sur la terre du Liban. Et comme je suis l’un d’eux, je me suis vu enlevé et tué sur la route, en allant à mon village de Nabha. Et si cette intuition se vérifie, je laisse un mot aux gens de ma famille…  J’ai une seule demande à vous faire : pardonnez à ceux qui m’ont tué. Faites-le avec tout votre cœur, et demandez avec moi que mon sang, même si c’est le sang d’un pécheur, soit un rachat pour les péchés du Liban, une hostie mêlée au sang de ces victimes qui sont tombées, de tous bords et de toutes les religions, et un prix pour la paix, et l’amour, et l’entente qui ont été perdus par cette patrie, et même par le monde entier ».

La prière de Ghassibé est entendue. Les siens offrent publiquement leur pardon. Frère Roger de Taizé, de passage au Liban, rencontre alors sa mère et témoigne : « Ce qui m’a le plus ému dans son comportement, c’était sa volonté de pardonner. Le pardon est la plus grande preuve d’amour qui existe. Souvent, pardonner nécessite d’arracher quelque chose qui est en nous. Pardonner signifie aimer et consoler. Et elle en était capable. A mes yeux, cette femme nous montre la route à suivre et éclaire notre chemin. Elle est la preuve vivante que le pardon est une vérité essentielle ».

 

Didier Rance, auteur de Prier 15 jours avec les martyrs du XXe siècle, Nouvelle Cité, 2004

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