Sœur Maïa est directrice de l’école des saints cœurs à Ein Abel, au sud du Liban. Depuis le 7 octobre, les missiles pleuvent dans sa région, mettant en danger sa communauté religieuse et ses élèves. Témoignage d’une vie donnée pour les autres.

« À 8 ans j’ai vécu la guerre contre les Syriens, mais je ne m’attendais pas à cette nouvelle guerre, plus dangereuse » témoigne sœur Maïa El Beaino, ajustant fébrilement son voile bleu marine sur ses cheveux noirs. Sa communauté de Sœurs des Saints-Cœurs à Ain Abel réside à 4 km de la frontière avec Israël, en plein dans le champ de tirs d’Israël et du Hezbollah. Deux jours après l’attaque du Hamas du 7 octobre, des champs d’oliviers ont été brûlés, des maisons saccagées, des enfants et des adultes tués.« À Ain Abel, nous nous sommes retrouvés à 120 sur 1500 personnes ! ».

Malgré la peur – 7 missiles sont tombés sur le village-, sœur Maïa reste : « Nous ne pouvions pas abandonner notre peuple…ni notre école ». Regroupant 1000 élèves moitié chrétiens, moitié musulmans, l’établissement, dirigé par sœur Maïa, est réputé pour son excellence. Ici les valeurs telles que l’effort et l’optimisme sont enseignées au même titre que le numérique ou l’intelligence artificielle. « Une de nos élèves vient de gagner un concours international qui lui offre un an d’étude à Washington et sept autres le concours de la francophonie ! » se réjouit la directrice.

Derrière le rythme enjoué de sa voix, on devine le dynamisme et la volonté de la religieuse. Malgré les bombardements intensifs et les coupures d’électricité, elle a immédiatement mis en place tous les cours en ligne et ainsi pu maintenir la scolarité des enfants. « Si nous fermons l’école, toutes les familles quitteront définitivement la région et les villages, vides, seront à la merci d’Israël » explique-t-elle, jetant un coup d’œil à sa montre connectée.

Là où il y a la mort, il faut semer la vie

À 44 ans, l’adaptabilité est l’un des mots clé de la supérieure : « Je viens de Jounieh, j’ai passé mon enfance à regarder les vagues! La vie est comme ces vagues, parfois elles nous arrivent dessus et il faut les surmonter avec agilité ». Mais son franc sourire tombe lorsqu’elle pense à son impossibilité de payer ses professeurs et d’organiser les mois à venir.

« Ma devise est une phrase du pape François entendue pendant le covid : ‘Là où il y a la mort, il faut semer la vie.’ » Alors elle sème. À la force du poignet, avec l’optimisme de son caractère et la douceur de la Vierge Marie. « J’ai toujours eu une relation intime avec la sainte Vierge, confie la religieuse, et je n’ai jamais cessé de prier… même si à 16 ans, j’ai fait ma rebelle en refusant d’aller à la messe pendant cinq ans ! » se souvient-elle en riant. Mais à 21 ans, le Christ l’appelle, et elle répond oui immédiatement. Elle veut être missionnaire comme mère Teresa. Alors elle choisit les Sœurs des Saints-Cœurs, première communauté missionnaire au Liban et sera envoyée au Tchad.

De retour au pays du Cèdre, elle met en place des camps d’été pour les jeunes entre le Tchad et le Liban. Mais aujourd’hui, tout est stoppé par la guerre. Et au milieu des bombardements qui ne cessent de pleuvoir, la tentation de quitter la région se fait pressante. Alors Sœur Maïa puise sa force dans ce passage de l’Évangile lorsque le Christ, après le départ de plusieurs de ses disciples, demande aux Douze : « Voulez-vous partir vous aussi ? » et Simon-Pierre de répondre : « Seigneur, à qui irions-nous ? Tu as les paroles de la vie éternelle » (St Jean,6).

Amélie Berthelin

Retrouvez nos articles dans notre magazine L’Eglise dans le monde

Nos actualités

Liban | Les dernières actualités

Nous soutenir

Votre soutien nous est nécessaire

Apportez votre pierre à l’édifice, donnez et vous recevrez ! « Donnez et il vous sera donné : on versera dans votre sein une bonne mesure, serrée, secouée et qui déborde ; car on vous mesurera avec la mesure dont vous vous serez servis. » (Luc 6, 38)

Faire un don Tous les moyens d'aider
Faire un don