Retrouvez le témoignage de Mère Maria Grazia

LETTRE DE SŒUR MARIA GRAZIA

Je ne connais ni vos visages ni vos noms, mais je sais seulement que vous avez ouvert vos cœurs à la voix du Seigneur et que vous avez mis en pratique la parole de l’Exode.

Me voici parmi vous pour vous parler de quelques miracles de Dieu : les précieuses offrandes et prières avec lesquelles vous nous avez aidées dans cette mission de nouvelle évangélisation.

Le Seigneur, en cette année de la foi, nous appelle à avoir encore plus de foi en Lui, en Son amour et en Sa Providence. Dieu est infiniment bon, même quand ne nous semblons pas le voir.

Dans la fondation du monastère portant le nom de saint Benoît, rattaché au sanctuaire Regina Sacratissimi Rosarii, il y a quatre moniales : la soussignée M. Prieure Sr, Sœur Maria de Jésus, Sœur Maria Immaculée, Sœur Maria Clemens et Laura, postulante géorgienne. Nous venons toutes de la communauté monastique bénédictine du monastère de Saint-Marc, à Offida, en Italie.

La population locale est bonne et nous aime. Ils nous témoignent souvent leur affection par des cadeaux en nature : fruits (tomates), légumes (pommes de terre), confitures, etc. Nous apprenons la langue et ce n’est pas très facile car certaines lettres de l’alphabet ont des sons particuliers qui sont très difficiles à répéter. Mais avec l’aide de Dieu, nous y parviendrons !

Il s’agit du premier monastère et sanctuaire catholique géorgien de toute la Géorgie, voulu par Dieu et construit par l’administrateur des Latins du Caucase, l’évêque Mgr Giuseppe Pasotto.

Notre monastère est situé sur une colline à 1 300 mètres d’altitude, d’où l’on peut voir tout le village d’Akalzike avec ses maisons orthodoxes.

Le terrain entourant le monastère-sanctuaire est parsemé de nombreuses pierres tombales. Tant de personnes sont enterrées y compris celles qui sont mortes d’une épidémie et qui ont été enterrées ici dans une fosse commune. Ces âmes, nous les sentons proches de nous par leur protection et aussi par leur joie, car elles peuvent se joindre à notre liturgie terrestre pour chanter les louanges du Seigneur.

Voici la photo de la croix sur le toit du sanctuaire. Dans la boule qui représente le monde, il y a des trous : ils ont été causés par les balles tirées par un soldat qui voulait faire tomber la croix. La croix est restée en place alors que le pauvre soldat est mort. Dieu protège ce lieu !

Le pays est pauvre économiquement et dans cette mission il est nécessaire d’y entrer en se déchaussant, comme Moïse sur le mont Sinaï, c’est-à-dire en enlevant les sandales de prétentions et de schémas mentaux, et en nous revêtant de simplicité, d’amour et de bienveillance envers un peuple qui a souffert de la dictature communiste, en croyant fermement que c’est le Seigneur qui veut cette maison de prière, de louange et d’intercession pour le monde.

Avec l’aide du Christ ressuscité, nous espérons vivre en recherchant la communion avec nos frères et voisins orthodoxes.

Que le Seigneur récompense de ses plus belles bénédictions tous ceux d’entre vous qui ont participé à la reconstruction de la maison de Dieu. Chaque soir, à complies, notre dernière prière, disons un Ave Maria pour les bienfaiteurs, pour vos besoins et pour vos proches. Avec mes sœurs, je vous salue dans le Seigneur Jésus ressuscité, avec sa très sainte Mère, la Reine du Saint Rosaire. Mère et notre Saint Père.

TEMOIGNAGE DE SŒUR MARIA GRAZIA

« Qu’est-ce qui rend ces femmes si libres intérieurement, bien qu’elles soient “enfermées” ? »

Mère Maria Grazia s’est posé cette question lorsqu’elle a rencontré pour la première fois des bénédictines à Offida, en Italie, alors qu’elle était encore jeune. Il lui a fallu trois ans avant d’être elle-même prête à vivre en personne cette expérience avec Dieu.

« Après vingt-cinq ans en tant que religieuse en Italie, j’ai tourné une nouvelle page en 2010. Au début, j’ai juste pensé “au secours !” quand Mgr Giuseppe Pasotto a appelé et demandé de l’aide pour fonder un monastère contemplatif en Géorgie. »

Un emplacement a été rapidement trouvé : Rabati, le centre historique d’Akhaltsikhe. Une église catholique s’y trouvait déjà au XIII ème siècle, et c’est là que se concentre la majorité de la petite diaspora catholique de Géorgie. Comme personne ne voulait du ci­metière du XIXème siècle ni du terrain vague at­tenant, l’Église catholique a pu acquérir le terrain.

« Jusqu’à l’inauguration du monastère en 2012, qui a été possible grâce à la contribu­tion de l’AED, nous avons vécu de nom­breuses aventures – sans aucune connaissance de la difficile langue géor­gienne ni aucune idée des techniques de construction. Encore aujourd’hui, en jardi­nant, nous trouvons des vestiges des généra­tions précédentes : des os, des livres de prières en décomposition, des chapelets », se souvient la prieure Maria Grazia.

Mgr Pasotto espère que les sœurs contem­platives pourront construire un pont vers la majorité orthodoxe. La relation avec cette Église sœur n’est pas sans troubles, mais il y a aussi des lueurs d’espoir. Mère Maria Grazia raconte : « Notre route d’accès n’était qu’un chemin boueux. L’évêque orthodoxe local a vu cela et a été horrifié. Une semaine plus tard, quand nous avons entendu le bruit des engins de chantier devant le monastère pen­dant les Laudes, cela nous a semblé être un chant angélique. »

Aujourd’hui, le monastère est un centre spi­rituel apprécié des catholiques des environs. « Les gens pleurent d’émotion et de bonheur quand nous leur offrons une médaille. Ce sont des gens simples, gentils et généreux. Ils nous donnent parfois tellement de pommes de terre que nous devons à notre tour en faire cadeau. Ils nous demandent nos prières pour une vache, un tracteur. Nous pouvons ainsi participer à leurs soucis et besoins quo­tidiens ».

Les bénédictines sont actives : elles ont transformé un désert en une petite oasis. Maintenant, elles prient pour qu’il y ait plus de vocations. Ce n’est pas facile, car même en Géorgie, les jeunes filles catholiques veu­lent fonder une famille et « faire carrière ».

AU SUJET DE LA GÉORGIE :

Interview de Marco Mencaglia, responsable des projets de l’AED international en Géorgie par Kira von Bock-Iwaniuk du service presse  de l’AED international

AED : « En Géorgie, la minorité catholique vit dans des conditions difficiles »

Depuis un an et demi, Marco Mencaglia est responsable des projets de l’AED en Géorgie. En octobre, malgré la pandémie, il lui a encore été possible de se rendre pour la première fois dans ce pays. Dans une interview menée avec Kira von Bock-Iwaniuk, il s’exprime au sujet de la situation de l’Église catholique en Géorgie.

AED : Quelle a été votre première impression de la Géorgie ?

M. Mencaglia : En raison de la pandémie, le voyage en Géorgie a failli ne pas avoir lieu, car le taux d’incidence dans ce pays était très élevé au début du mois de septembre. Lorsque les chiffres sont finalement tombés, nous avons pu faire le voyage mais, malheureusement, d’importants événements religieux ont dû être reportés en raison de mesures de précaution sanitaires.

La Géorgie est un pays doté d’une identité propre, forte et profondément enracinée, mais elle est en même temps ouverte et hospitalière. Comme carrefour historique de la rencontre des peuples et des cultures entre l’Orient et l’Occident, la Géorgie ne semble avoir rien perdu de sa vocation internationale. La religiosité fait certainement partie de cette culture, et les longues années sous le régime soviétique n’ont pas pu l’éradiquer. Au cours de notre voyage, nous avons entendu beaucoup d’histoires sur la foi qui a pu être préservée au fil du temps dans les régions rurales et en toute clandestinité, même sans présence officielle de l’Église.

Quelle est votre évaluation de la situation politique du pays ? Les conséquences de la guerre avec la Russie sont-elles encore présentes ?

La Géorgie est un pays avec quatre millions d’habitants et une longue frontière commune avec la Russie. Depuis la guerre en 2008, la Géorgie a rompu officiellement ses relations diplomatiques avec la Russie, et vit sous le stress résultant de la forte pression économique et politique exercée par sa puissante voisine, et sa propre orientation axée sur une plus grande intégration européenne.

Les positions du gouvernement actuel, qui a remporté les élections pour la première fois en 2012, et qui adopte une attitude plus conciliante envers Moscou, sont sévèrement critiquées par l’opposition politique.

Lors de notre visite à Tbilissi, il y a eu des tensions et des manifestations à cause de l’arrestation de l’ex-président Mikheïl Saakachvili, qui sont heureusement restées pacifiques. L’ex-président affichait une orientation pro-occidentale, et lors de son retour dans son pays natal, il a été arrêté et emprisonné pour des crimes commis durant son mandat. Les manifestations, heureusement pacifiques jusqu’à présent, réclament la libération de l’ancien président et de nouvelles élections.

En Géorgie, il y a seulement environ 1 % de catholiques. Comment voyez-vous les chances de survie de cette minorité ?

En Géorgie, l’Église catholique vit dans des conditions extrêmement difficiles. De nombreux croyants de l’Église orthodoxe – à laquelle appartient la majorité de la population (environ 85 %) – ne font souvent pas la différence entre identité religieuse et identité nationale. L’idée répandue selon laquelle un bon Géorgien doit être orthodoxe rend difficile pour les catholiques de vivre leur foi. À la différence de nombreuses autres Églises orthodoxes, l’Église géorgienne ne reconnaît ni le baptême ni le mariage catholiques. Ainsi, les couples mixtes sont contraints de choisir une confession et la belle-famille d’une personne catholique la soumet à une forte pression de renoncer à sa confession.

Enfin, plusieurs églises catholiques utilisées par les orthodoxes sous le régime soviétique n’ont jamais été restituées, et à ce sujet, il n’existe aucun dialogue.

L’Église catholique réagit à cette attitude hostile en évitant toute confrontation et en tentant de promouvoir autant que possible le dialogue et la compréhension mutuelle. Pour encourager le dialogue, en revanche, il est nécessaire de maintenir une présence vivante et pas seulement symbolique dans les communautés. Pendant notre voyage, nous avons été témoins de l’admirable esprit missionnaire des religieux et des laïcs ‒ Géorgiens et non Géorgiens ‒ qui œuvrent au milieu de tant de difficultés, d’événements peu gratifiants et parfois avec l’impression d’être isolés. En ce sens, l’ordination sacerdotale d’un jeune Géorgien durant la visite de l’AED constituait un signe d’espoir pour le petit troupeau de l’Église catholique géorgienne. Le nouveau prêtre, le père Beqa, est le sixième prêtre catholique géorgien ordonné depuis la chute du régime soviétique.

Eu égard au taux de chômage pouvant atteindre 60 % dans ce pays, et de la pauvreté que vous avez vue partout, pensez-vous que l’Église catholique puisse apporter une réponse et jouer un rôle décisif ?

L’Église catholique en Géorgie est très minoritaire, mais sa présence est néanmoins très significative depuis les premières années qui ont suivi l’effondrement de l’Union soviétique, notamment au niveau social. Il existe une multitude de projets réalisés par des missionnaires dans les domaines de la santé, de l’éducation et de l’aide aux nécessiteux. Et pourtant, l’Église catholique est partie pratiquement de zéro, dans un environnement difficile, avec peu de moyens et un nombre restreint de personnes. Les fruits de près de trente ans de travail dans ce domaine sont clairement visibles et nous avons pu les constater lors de notre visite : les multiples activités de Caritas, les soins de santé dispensés par les religieux et religieuses de l’Ordre des Clercs réguliers pour les Malades (Camilliens) à Tbilissi et Gori, l’université catholique à Tbilissi, le centre de soutien aux  familles à Koutaïssi et le centre pour les enfants handicapés « Talitha Koumi » à Akhaltsikhé n’en sont ici que quelques exemples parmi d’autres.

Pour conclure, pourriez-vous décrire la rencontre qui vous a le plus fortement impressionné durant votre voyage ?

Je pourrais évoquer plusieurs exemples de l’esprit missionnaire qui anime les petites Églises de Géorgie et d’Arménie, actives et vivantes au sein de tant de difficultés, à commencer par Mgr Giuseppe Pasotto, qui a d’abord été missionnaire et qui est maintenant, depuis plus de vingt ans, évêque de l’Église catholique de rite latin du Caucase, dont le siège se situe à Tbilissi. J’aimerais aussi mentionner une petite communauté de religieuses bénédictines contemplatives qui nous ont accordé l’hospitalité dans leur couvent à Rabati, dans le sud de la Géorgie. Originaires d’Italie et venues ici sans aucune connaissance de la culture ni de la langue géorgiennes, elles remplissent depuis des années une mission faite de défis permanents et emplie de petites joies quotidiennes. Plus encore que par leurs paroles, nous avons été impressionnés par leur confiance en Dieu, leur détermination, leur préoccupation des autres dans un environnement qui ne leur est certainement pas familier. Il n’est pas rare qu’au cours de nos voyages, nous rencontrions ces « témoins silencieux » qui assurent en toute discrétion leur précieux ministère et, j’ose l’exprimer ainsi, sont fondamentaux pour la vie de l’Église.

Et comment l’AED peut-elle apporter son aide ?

L’AED s’est donné pour objectif de poursuivre son soutien à l’Église catholique géorgienne dans tout ce dont elle a besoin au quotidien pour sa mission, afin de garantir sa présence et son activité. Nous devons prendre conscience que, sans soutien international, cette mission serait très difficile, voire impossible.

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