Le 19 mars, le gouvernement syrien a ordonné la fermeture de tous les magasins, par crainte de la propagation du coronavirus. Après 9 ans de guerre, le pays a une économie en berne et un système de santé gravement détérioré. Le Père Antoine Tahhan, prêtre catholique arménien à Alep, appelle à une levée des sanctions économiques pour que la Syrie parvienne à survivre.

Le Père Antoine Tahhan va tous les matins à l’église catholique arménienne de la Sainte-Croix  à Alep pour célébrer la messe, puis rentre chez lui afin de respecter le confinement. Il s’inquiete pour les Syriens qui ont déjà vécu 9 ans de guerre: « La Syrie a perdu de nombreux hôpitaux et centres de santé, détruits par les terroristes, comme l’hôpital Al-Kindi et l’hôpital ophtalmique. De nombreux appareils et instruments médicaux ont été pillés. De nombreux médecins ont émigré parce que les terroristes les avaient séquestrés ou menaçaient de les tuer. Le système de santé se trouve donc en situation de fragilité, et les gens craignent que le virus ne se propage au sein de la population, surtout parmi les soldats arabes syriens », explique le Père Antoine.

« Je ne pense pas que les respirateurs dans les hôpitaux, en particulier dans les unités de soins intensifs, soient suffisants pour combattre le virus. Nous aurions également besoin de beaucoup de masques chirurgicaux, de stérilisateurs et d’autres matériels. Cependant, nous devons sensibiliser davantage le public à la question de la santé. Jusqu’à présent, il y a encore beaucoup de gens qui se promènent dans les parcs, se donnent la main ou se saluent sans tenir compte des mesures de santé publique recommandées ».

L’émigration à Alep a fait des ravages

Le Père Antoine avec l’icône de Marie Consolatrice

La ville d’Alep a été libérée le 24 décembre 2016. Les rares familles aisées ont restauré leurs maisons. Mais la plupart des familles chrétiennes ont des ressources limitées et vivent grâce à l’aide de l’église locale, soutenue par des organisations telles que l’AED qui a créé des programmes d’aide d’urgence pour payer les loyers, la nourriture et l’assistance médicale pour de nombreuses familles à Alep et ailleurs en Syrie. « Sans ces aides, les chrétiens ne pourraient pas rentrer chez eux ni préserver la présence chrétienne au Proche-Orient » assure le prêtre.

L’émigration à cause de la guerre a fait des ravages, comme le raconte le prêtre : « Le nombre de familles chrétiennes, toutes confessions confondues, qui vivaient à Alep avant la guerre était de 30 000. Aujourd’hui leur nombre est tombé à 10 000. En outre, nous souffrons d’un vieillissement énorme de la population. Le nombre de personnes âgées a augmenté jusqu’à représenter les deux tiers de la société, non seulement à Alep, mais aussi dans toute la Syrie. Le manque de jeunes actifs est aggravé par le service militaire ».

La Syrie souffre d’une terrible crise économique depuis plus d’un an. « Lorsque la ville d’Alep a été libérée, il y avait de l’optimisme, et pendant 3 ans beaucoup de gens ont mis leurs espoirs dans le travail, cependant la situation économique globale ne cesse de se détériorer. Beaucoup de gens sont au chômage et les salaires ne suffisent pas à subvenir aux besoins d’une famille de quatre personnes. Les sanctions économiques font beaucoup souffrir la population, et la mauvaise situation économique au Liban a affecté l’économie syrienne, le dollar ayant grimpé en flèche [par rapport à la monnaie locale], et avec lui le coût de la vie. Les aides qui entraient en Syrie à travers le Liban ont également été suspendues ».

« Il faut lever les sanctions économiques »

Depuis la libération d’Alep, 75 familles arméniennes-catholiques sont revenues. Toutefois, il s’agissait de celles qui avaient été déplacées dans d’autres régions du pays, et non de celles d’Europe. « Pour encourager les familles à retourner en Syrie, il faut une levée des sanctions économiques – comme le Pape l’a demandé dans son discours de Pâques – et il est nécessaire d’aider les jeunes à trouver un emploi. Nous avons également besoin de sécurité, d’une assistance médicale et d’une suppression de la réserve militaire afin que les jeunes puissent travailler, construire leur avenir et fonder une famille », conclut le Père Antoine.

Le coronavirus est une préoccupation parmi beaucoup d’autres, mais l’épidémie mondiale conduit les syriens à craindre surtout les conséquences économiques qui, d’une part, pourraient encore aggraver le calvaire qu’ils vivent et, d’autre part, conduire à une diminution des aides et des programmes d’urgence, qui sont maintenant plus nécessaires que jamais pour survivre.

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