tribune-photo1-mgr-sleimanDe la peur à la crainte du Seigneur.

Peur de mourir dans un attentat,  peur d’être infidèle au Christ, peur de l’avenir…Que faire du poids de nos peurs légitimes ? Réflexion de Mgr Sleiman, archevêque de Bagdad, ville considérée en 2015 comme la plus dangereuse du monde avec 380 attaques terroristes en un an.

La peur, fille de l’angoisse, est profondément enracinée dans notre psychologie. Elle est inhérente à notre existence. Entre l’entrée angoissée dans la vie du nouveau-né et l’angoisse devant la mort, il y a toutes sortes  de peurs. Notre civilisation contemporaine en est dominée.  Le terrorisme et les violences de toutes sortes, la criminalité, les maladies graves comme le cancer, le sida et d’autres, les crises financières et économiques, l’abandon et la solitude qui en résulte, autant de causes qui engendrent la peur qui nous rend vulnérables, exploitables et manipulables. Mais au cœur  de tout ce tumulte, la voix du Seigneur se fait entendre: “n’aie pas peur, n’ayez pas peur, votre libération est proche. Aussi il nous faut, toujours et partout, dépasser nos peurs dans la foi, résister dans l’espérance et communiquer aux autres dans la charité.

En fait, il nous faut nous regarder dans la lumière du Saint-Esprit pour découvrir nos peurs.  Il faut aussi lui demander ses dons qui nous aident à dépasser, voire à transfigurer, nos  peurs. Or le premier don, c’est la crainte du Seigneur. C’est différent de la peur. La première nous unifie en nous stimulant dans notre recherche du Seigneur. S’il y a crainte, c’est celle de le perdre de vue, de le trahir, de l’oublier. Cette crainte nous libère alors que la peur nous bloque, nous inhibe, nous enferme dans nos faiblesses.

La crainte du Seigneur nous lance vers la sagesse, don suprême de l’Esprit. Elle active notre piété, qui personnalise notre relation avec Dieu dans la vénération et le respect, enrichit le don de science, qui nous est donné pour éclairer notre vie dans son rapport avec la vérité divine se révélant dans la création, augmente en nous la force, vertu cardinale renforcée par la prudence, qui nous permet d’agir dans la foi, selon la raison et dans la liberté. Elle  prépare notre cœur à accueillir le don du conseil qui, en perfectionnant notre prudence, nous donne de discerner ce qui contribue le plus à la gloire de Dieu, à notre salut et à celui du prochain. Elle stimule notre raison à intérioriser le don de l’intelligence, qui nous introduit dans le mystère de Dieu et son action dans le monde, tout en nous éclairant sur le monde qui passe, ses vicissitudes, ses dérives, l’amour du Seigneur qui a offert son Fils pour le sauver. La crainte est couronnée à la fin par la sagesse, par laquelle Dieu nous rend semblables à Lui, nous associe à sa vérité et à son amour. La sagesse est la sérénité suprême dans ce monde tourmenté.

L’Esprit transforme donc nos peurs, bien légitimes, qui sont notre héritage anthropologique fondamental, en crainte du Seigneur qui se révèle comme la vraie sagesse.

A la lumière de ces réflexions rapides, nous comprenons mieux les saints et, notamment, les martyrs. Nous communions alors avec des chrétiens qui vivent aujourd’hui le martyre au Moyen-Orient comme au Pakistan ou en Inde. Mais aussi ceux qui, dans les pays libres et civilisés, sont blessés par les « princes de ce monde » qui cherchent le pouvoir dans et par l’argent, dans des législations démagogiques qui font fi de la nature, de la culture, de la religion et même du bon sens.

N’ayons pas peur, le Père nous réserve son royaume.

Mgr Jean Sébastien Sleiman, archevêque latin de Bagdad.

(Tribune tiré du dernier numéro de notre magazine d’information l’Eglise dans le Monde)

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