La responsable de projet de l’AED Regina Lynch revient de Damas. Elle décrit la situation des chrétiens syriens, 11 ans après le début de la guerre civile. Propos recueillis par Filipe d’Avillez.

Alep, en Syrie, porte toujours les stigmates des terribles combats urbains dont elle a été le théâtre

Ce mois-ci a marqué la 11ème année de guerre en Syrie, mais cet anniversaire n’a pas eu beaucoup d’impact dans les médias…

La guerre en Ukraine domine à juste titre les gros titres, et nos partenaires de projets en Syrie ont également exprimé leur inquiétude pour les victimes de la guerre et ont prié pour la paix. Cependant, il est également vrai que le conflit en Syrie qui entre dans sa 12ème année risque d’être oublié par les médias.

Les dirigeants chrétiens locaux ont-ils l’espoir que la situation s’améliorera un jour ?

En tant que chrétiens, nous devons avoir de l’espoir, et notre foi nous donne cet espoir. C’est la foi qui inspire la charité, si nécessaire dans la situation humanitaire actuelle qui ne cesse de se dégrader. Surtout pendant les mois les plus froids de l’année. Dans de nombreuses régions du pays, les températures tombent en-dessous de zéro la nuit. Or, au moins 90% de la population vit en-dessous du seuil de pauvreté, ce qui signifie que les gens n’ont pas d’argent pour acheter du mazout ou pour payer l’électricité pour ajouter des heures supplémentaires aux quelques heures fournies par le réseau.

Comment la guerre a-t-elle affecté la foi des chrétiens en Syrie ?

De nombreux chrétiens en Syrie ont subi de terribles traumatismes au cours des onze dernières années. Ils ont perdu des êtres chers, ont été témoins de violences extrêmes et ont même été menacés de mort parce qu’ils étaient chrétiens. Je crois que c’est grâce à leur foi que beaucoup ont pu supporter cela. L’année dernière, nous avons rendu visite à une femme dont le mari a été enlevé, et probablement assassiné, par des extrémistes islamiques à Maaloula. Sa seule consolation est dans l’Église et dans la foi, et en particulier auprès des sœurs qui soutiennent sa famille. Pour de nombreux chrétiens, la guerre a eu un effet positif sur leur foi et a donné à l’Église l’occasion – malgré les difficultés – de mettre en pratique ses enseignements sur la charité et le pardon.

Les sanctions économiques, présentées comme une alternative à la guerre, affectent sérieusement la population. Après avoir vu l’effet à long terme des sanctions en Syrie, quel est votre point de vue ?

Avant le début de la guerre, les chrétiens de Syrie ne dépendaient pas d’une aide extérieure. En fait, ils avaient leurs propres œuvres de bienfaisance locales pour aider les plus pauvres. Il est maintenant très triste de voir à quel point un pourcentage aussi important de la population a un besoin urgent d’aide humanitaire. Il est clair qu’en Syrie, ce sont les gens ordinaires qui sont les victimes des sanctions. L’inflation est galopante de sorte qu’ils n’ont plus les moyens de se payer des médicaments, des opérations, de la viande, du lait pour leurs enfants, ni même un billet d’autobus pour aller à l’école ou à l’université. Même ceux qui ont de la famille à l’étranger ne peuvent pas recevoir d’argent à cause des embargos bancaires. La réalité est que la plupart des sanctions en Syrie ont surtout pour effet de nuire aux gens ordinaires. L’Église locale s’est prononcée fermement contre ces sanctions, et nous soutenons ces appels.

Quels sont les besoins les plus pressants des personnes aidées par les œuvres de bienfaisance catholiques en Syrie ?

Il est toujours urgent de fournir une aide d’urgence pour répondre aux besoins mentionnés ci-dessus, mais il est également important de se concentrer sur les jeunes. Ils doivent être affermis dans leur foi chrétienne, pour qu’ils comprennent qu’ils ont un rôle à jouer en Syrie. Nous devons également aider les jeunes familles chrétiennes, sur le plan financier et spirituel.

L’aide que vous apportez s’adresse-t-elle uniquement aux catholiques ou également aux personnes d’autres religions ?

Chaque organisation a son propre charisme qui dépend aussi dans une certaine mesure de l’origine de ses fonds, c’est-à-dire de son caractère gouvernemental ou non gouvernemental. L’AED est une organisation catholique qui repose principalement sur des donateurs catholiques individuels, et nos partenaires de projets en Syrie sont les dirigeants des Églises catholiques ou orthodoxes. À leur tour, ils aident principalement leurs propres communautés, en développant les activités pastorales de l’Église. Mais il y a aussi des projets qui bénéficient aux musulmans qui ont besoin d’aide.

En Syrie, par exemple, de nombreuses religieuses se concentrent sur la visite des familles et le soutien de leur foi, de sorte qu’elles aident principalement les chrétiens qu’elles rencontrent par leur travail pastoral. Mais l’Église dispose également, par exemple, d’écoles catholiques soutenues par l’AED où de nombreux élèves, voire la plupart, ne sont pas chrétiens mais musulmans.

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