Onze ans après les promesses des « printemps arabes », la Syrie demeure dans une situation désastreuse, ruinée par la guerre et les sanctions internationales.

Veuve pleurant dans le cimetière d’Alep (crédit AED/IsmaelMartinezSanchez)

« La situation actuelle est pire que la guerre », affirme le plus sérieusement du monde cet homme qui tient un petit café au cœur d’Alep. En face de son échoppe, un quartier réduit à l’état de décombres dresse tristement ses ruines, témoins de la violence des combats qui ont déchiré la capitale économique de la Syrie. La phrase terrible de ce tenancier est souvent répétée en Syrie par ceux qui, comme lui, ont connu l’angoisse des bombardements et la perte d’êtres chers, dans un conflit qui aurait tué 600 000 personnes depuis 2011.

Le Nonce apostolique en Syrie, le cardinal Mario Zenari, justifie le point de vue de ses compatriotes d’adoption : « Pendant la guerre, on avait l’espoir de voir le conflit finir. Et malgré toutes les difficultés, les gens arrivaient à travailler, à vivre. À présent, même ceux qui cumulent deux emplois ne parviennent plus à s’en sortir. Chaque trimestre, le prix des denrées augmente, alors que les salaires ne suivent pas. » Pourtant, l’essentiel du territoire est repassé sous le contrôle de l’armée arabe syrienne, et l’on pourrait s’attendre à une reconstruction du pays. Mais il manque pour cela l’apport de la manne pétrolière. Les puits de pétrole et de gaz, concentrés dans les déserts de l’Est du pays, sont sous contrôle kurde.

Par ailleurs, la Syrie continue à être soumise à des sanctions économiques qui l’empêchent de retrouver son dynamisme d’avant-guerre.

Enfin – et surtout – la Syrie a perdu une grande part de ses forces vives. Les jeunes gens et les personnes éduquées ont fui en masse. Parmi les 22 millions d’habitants que comptait la Syrie avant-guerre, plus de 6 millions se sont exilés et ne reviennent pas.

Les chrétiens sont particulièrement touchés par le phénomène. Cibles privilégiées des djihadistes, ils ont vécu un traumatisme qui demeure gravé dans toutes les mémoires. « Pas une famille n’est intacte, toutes ont perdu un proche, un frère, une tante dans cette guerre », témoigne une enseignante de Damas. Bénéficiant d’un niveau d’éducation supérieur à la moyenne des Syriens, les chrétiens ont aussi davantage d’opportunités de quitter le pays. En 2022, ils ne représentent plus que 3,5% de la population, alors que l’on en comptait environ 10% en 2011.

Espérance inattendue

Malgré toutes ces difficultés, de jeunes chrétiens tiennent à assurer qu’ils feront « tout leur possible pour rester sur leur terre ancestrale ». C’est ainsi que des volontaires de l’Église apostolique arménienne d’Alep s’engagent auprès de leurs compatriotes défavorisés. Chargés de sacs de provisions, ils parcourent des quartiers complètement ruinés, au secours des habitants les plus pauvres qui ne parviennent plus à se nourrir correctement. La ville n’a plus qu’une heure d’électricité par jour, plus de fioul pour se chauffer, alors les gens empilent les couvertures pour dormir au chaud. Mais au moins ont-ils un repas grâce au dévouement de ces jeunes gens, tous étudiants, qui ont entre 18 et 22 ans, et dont l’enthousiasme donne une touche d’espérance inattendue au sombre tableau de « l’hiver arabe » syrien.

Sylvain Dorient

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