Le chef de l’Église grecque-catholique ukrainienne, l’archevêque majeur Sviatoslav Chevtchouk confie la fatigue de son peuple.

Loin de la ligne de front, la guerre semble invisible pour le visiteur étranger. Elle est pourtant présente à tous moments à l’esprit des Ukrainiens, confie Mgr Sviatoslav Chevtchouk :

Cimetière de Lychakivskyi, rencontre avec un aumônier militaire.

« Le sentiment du peuple ukrainien est celui d’une profonde lassitude. Les gens sont fatigués, parce qu’il n’y a aucune chance que cela se termine », a déclaré l’archevêque majeur Mgr Chevtchouk. « La population est terriblement traumatisée par la guerre, et la question clé est de savoir comment nous allons lutter contre ce traumatisme. L’avenir du pays est lié à la question de savoir comment gérer les traumatismes. 80% des gens sont blessés, beaucoup physiquement, mais il y a surtout des blessures dans l’âme. D’un autre côté, il y a le traumatisme psychologique et je peux vous en parler de première main. Quand je sors, il m’est terriblement difficile de m’habituer aux bruits. En tant qu’Église, nous devons d’abord et avant tout prendre soin des prêtres. Plus de 50 % d’entre eux nous ont dit qu’ils étaient épuisés », a-t-il ajouté.

« La guerre que nous vivons actuellement en Ukraine n’est plus une guerre ou une attaque directe, c’est une guerre d’épuisement. Comment puis-je éviter d’être épuisé par la fatigue ? Seul l’amour authentique ne se lasse pas de lutter, ce sont les valeurs authentiques qui peuvent nous aider à surmonter le découragement », a-t-il souligné.

La peur de l’oubli

L’archevêque majeur Mgr Sviatoslav Chevtchouk a souligné la situation désastreuse à laquelle l’Ukraine est confrontée au cours de ce deuxième hiver de guerre, en particulier en termes d’infrastructures électriques. L’année dernière, 60% des infrastructures électriques du pays ont été détruites par la guerre. On estime que cette année, jusqu’à 75% des Ukrainiens devront compter sur des générateurs pour l’électricité et le chauffage. Le 2 décembre, Kiev a subi l’un des bombardements les plus graves de cette guerre, nous rappelant l’urgence de la situation. Selon le responsable gréco-catholique, on craint que la guerre en Ukraine ne soit oubliée dans le monde, ce qui pourrait entraîner une diminution de l’aide humanitaire et laisser le peuple ukrainien seul dans sa situation d’extrême nécessité.

Réconciliation et pardon

La guerre en Ukraine a créé des divisions et du ressentiment dans la société. La douleur est devenue une réalité quotidienne pour de nombreux Ukrainiens. « Aujourd’hui, il y a une ligne de démarcation en fonction de l’expérience que l’on a eue de la guerre », a expliqué Mgr Chevtchouk. Les familles ont également souffert de ces divisions. Il y a, dit-il, une division entre ceux qui sont partis et ceux qui sont restés, entre les maris au front et les femmes évacuées, entre ceux qui vivent la guerre dans l’ouest de l’Ukraine et ceux qui la vivent dans l’est. L’archevêque majeur a souligné l’importance de travailler ensemble pour surmonter ces différences et construire une nouvelle communauté basée sur le respect et la tolérance. « Le sentiment d’abandon et le ressentiment à l’égard des autres sont aussi des armes de guerre sociologiques. Les gens cherchent un bouc émissaire, quelqu’un à blâmer pour tout », a-t-il déclaré.

Face à l’adversité, l’archevêque majeur Mgr Chevtchouk a appelé à la réconciliation et au pardon dans le cadre du processus de guérison des traumatismes. Il a reconnu que le pardon pouvait être très difficile, mais a souligné l’importance de ne pas laisser la haine s’emparer du cœur des gens. La première étape avant la réconciliation est la résilience : « Si la peur et la haine s’emparaient de nos décisions, nous en serions esclaves. Bien que la haine soit normale à cause de l’agression que nous subissons, y succomber signifie qu’elle a une victoire sur mon cœur », a-t-il conclut.

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