Le prédicateur chrétien Muhammad Kacé, emprisonné pour « blasphème » le 23 août a été tabassé en prison, comme le révèle une photographie qui a été révélée à la presse indonésienne. Son traitement démontre une série de dysfonctionnements graves de l’administration.

Cette photo a été prise peu avant le 18 septembre, soit plus de 3 semaines après l’agression de Muhammad Kacé en prison.

« Ils ont laissé passer du temps pour qu’il soit plus présentable, mais on voit bien qu’il a été frappé », dénonce Léo, Indonésien chrétien et membre de l’ASKRI (Association des youtubeurs chrétiens indonésiens). De fait dès son arrestation, Muhammad Kacé, alors qu’il était à l’isolement a été tabassé, couvert d’excréments, par des détenus. Ceux-ci étaient mené par un inspecteur général de police, nommé Napoléon Bonaparte, qui a revendiqué ses exactions dans une lettre ouverte.

Aucune excuse

Ce général, au nom étrange à des oreilles francophones, écrivait que : « N’importe qui peut m’insulter, mais pas contre mon Allah, le Coran, le prophète Mahomet et ma foi islamique, alors je jure que je prendrai des mesures mesurées contre quiconque ose le faire », a-t-il déclaré. Son aplomb est d’autant plus étonnant dans cette affaire que l’homme est condamné à une peine de quatre ans pour corruption. Le fait qu’il ait pu se rendre dans la cellule d’un détenu à l’isolement, alors que celui-ci n’avait même pas pu rencontrer ses avocats pour cause de « confinement contre la Covid19 », démontre les dysfonctionnements de la police indonésienne.

L’affaire Muhammad Kacé n’est pourtant que « la fumée qui cache le feu », assure Léo. En effet, le conflit dont Muhammad Kacé fait les frais en ce moment a débuté il y a des années sur Internet. Pour trouver « la braise qui a allumé le feu », il faut remonter au prédicateur indonésien musulman Ustad Abdul Somad. Celui-ci, dans un prêche brûlant, avait affirmé que « la Croix contient un djinn », autrement dit, un démon. Cet objet « possédé » serait si néfaste que les musulmans qui meurent dans des hôpitaux chrétiens où se dressent la croix « vont directement en enfer ». La Justice indonésienne, saisie pour « blasphème » ont relaxé le prédicateur, car sa prise de parole n’avait pas été diffusée par Ustad Abdul Somad lui-même. Plusieurs prédicateurs chrétiens ont répondu à cette provocation, dont Muhammad Kacé lui-même.

Clerc musulman puis prédicateur chrétien

Il parlait en connaissance de cause, car il fut un clerc musulman, il enseigna dans des écoles islamiques, fit trois fois le pèlerinage à la Mecque, avant d’être baptisé comme chrétien en 2014. Après sa conversion, il se mit à critiquer ouvertement l’islam. Ses quelques 400 vidéos atteignirent des millions d’internautes. Dans la dernière d’entre elles, il dénonçait la violence que contient le « Kitab Kuning », le petit livre jaune, utilisé comme livre de référence dans toutes les écoles coraniques en Indonésie.

Le collectif d’avocats qui prend la défense de Muhammad Kacé vit sous pression des extrémistes. Plusieurs se sont déjà désistés, de peur des représailles qui peuvent être exercées contre eux ou leurs familles.

De son côté le vice-président du Conseil indonésien des oulémas ( MUI ) Anwar Abbas a émis un avis ambigüe sur les actions du dénommé Napoléon Bonaparte. Cette organisation qui constitue la plus grande instance religieuse du pays avait demandé à la police de faire arrêter Muhammad Kacé, après d’autres « chrétiens blasphémateurs ». Malgré le rôle qu’elle a eu dans son arrestation, elle n’exprime pas de remord. Ainsi Anwar Abbas écrivait-il lundi 20 septembre : « Napoléon Bonaparte n’est pas n’importe qui, c’est quelqu’un qui comprend la loi, il la comprend même très très bien car c’est un haut gradé de la police […] Mais si sa religion et sa foi sont insultées, rabaissées, en tant qu’être humain ordinaire et en tant que croyant, il y a bien sûr des limites à sa patience ».

Il conclut sa lettre en souhaitant que la police agisse rapidement, aussitôt que quelqu’un ose insulter l’islam.

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