L’accord de cessez-le-feu conclu entre la République d’Azerbaïdjan musulmane et l’Arménie chrétienne valide la victoire de l’Azerbaïdjan et de la Turquie contre l’Arménie.

« J’avais dit qu’on chasserait [les Arméniens] de nos terres comme des chiens, et nous l’avons fait », a déclaré Ilham Aliyev, le président de l’Azerbaïdjan. De fait, le cessez-le-feu qu’il vient de conclure avec l’Arménie valide la victoire de ses armées, soutenues par la Turquie, face à la résistance des défenseurs de la République d’Artsakh, république à majorité arménienne non reconnue par la communauté internationale.

L’ombre de 1915

L’accord prévoit que les populations civiles puissent revenir sur leurs terres, mais l’application de cette partie du texte pose question. Les Arméniens qui peuplaient le Haut-Karabakh savent ce qu’il en coûte de vivre sous domination azérie ou ottomane. Traités comme des citoyens de seconde zone, fréquemment victimes de pogroms, leur situation a atteint son paroxysme dans l’horreur lors du génocide organisé par l’Empire Ottoman à partir de 1915. Ces évènements ont fréquemment été rappelés par les Arméniens lors du conflit de 2020, afin d’éveiller la communauté internationale, en vain. Après 6 semaines de combats courageux, la résistance arménienne a dû s’incliner devant la supériorité en nombre et en matériel de l’ennemi. Le 9 novembre, le Premier ministre arménien Nikol Pashinyan déclarait : « Le texte de la déclaration, qui a déjà été publié, est incroyablement douloureux pour moi et pour notre peuple ».

À cette annonce, des manifestants arméniens ont envahi le Parlement dénonçant une « trahison ». La région du Haut-Karabagh, que les Arméniens appellent l’Artsakh, est une très ancienne terre arménienne, couverte d’églises, dont certaines datent du IVe siècle. En cette fin d’année 2020, 99% de la population de l’Artsakh appartient à l’Église arménienne autocéphale, mais on est en droit de craindre une brutale transformation de la démographie de la région.

Victoire perdue

Ce ne serait pas la première. L’Artsakh, ou Haut-Karabagh, fut séparée de sa patrie en 1921 par Staline. Il s’agissait d’appliquer le précepte, cher aux tsars avant lui, de « diviser pour mieux régner ». Pour faire bonne mesure, il y a implanté une population Azérie. Ce mouvement de population planifié a transformé la démographie de la région. Le recensement effectué en 1923 a dénombré 94% d’Arméniens dans la région contre 75,9% en 1979. La population azérie, encouragée à se rendre sur place, comptait alors 37 300 individus (22,9%).

Aussitôt que l’URSS s’est effondrée, en 1991, de violents conflits opposèrent les Arméniens et les Azéris. L’Azerbaïdjan était déjà à l’époque mieux armée. Elle recevait une aide militaire et des provisions de la Turquie et de plusieurs États arabes, et elle eut l’avantage dans la première phase du conflit. Mais les Arméniens, défendant leurs montagnes et soutenus par la diaspora, ont fini par rejeter l’armée azérie hors de la région disputée. La population azérie, qui avait été importée, eut le choix entre la valise et le cercueil. En 2020, l’exploit militaire arménien n’a pas été réédité. Abandonnée à elle-même, l’Arménie a dû faire face à des armes redoutables, adaptées au terrain montagneux. Le président turc Recep Tayyip Erdogan aurait, par ailleurs, fourni à l’armée azérie le soutien de mercenaire syrien, si l’on en croit plusieurs médias français (le Monde, La Croix, le Point). Quant à Vladimir Poutine, il n’a pas pris parti, jouant les arbitres impartiaux quand il était devenu évident que les Arméniens avaient perdu la bataille. Après le 9 novembre, il a déployé des observateurs militaires russes pour vérifier que les conditions de paix soient respectées par les deux camps.

Face à la disproportion des forces en présence et en raison des arguments évidents qui plaident en la faveur des défenseurs de l’Artsakh, on peut s’étonner de l’absence de réaction de la communauté internationale. La récente interview du chirurgien français Patrick Knipper, qui dénonce l’utilisation de phosphore blanc par l’armée azérie, ouvre toutefois la possibilité d’une mise en accusation de cette dernière pour crime de guerre.

Nos actualités

Arménie | Les dernières actualités

Nous soutenir

Votre soutien nous est nécessaire

Apportez votre pierre à l’édifice, donnez et vous recevrez ! « Donnez et il vous sera donné : on versera dans votre sein une bonne mesure, serrée, secouée et qui déborde ; car on vous mesurera avec la mesure dont vous vous serez servis. » (Luc 6, 38)

Faire un don Tous les moyens d'aider
Faire un don